
Le retrait effectif du Mali, du Niger et du Burkina Faso de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) depuis le 29 janvier 2025 continue de susciter des débats au sein de la communauté internationale. Lors de la 17ᵉ Réunion du Comité de Pilotage de la Stratégie Intégrée des Nations Unies pour le Sahel (UNISS), qui s’est tenue le 4 février à Dakar, les Nations Unies ont exprimé leur volonté de jouer un rôle de « facilitateur impartial » entre l’Alliance des États du Sahel (AES) et la CEDEAO. Une initiative qui a toutefois soulevé de nombreuses critiques, notamment de la part des populations africaines.
L’ONU veut se positionner en médiateur
Lors de cette réunion, Leonardo Santos Simão, Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, a mis en avant la nécessité de préserver la coopération sous-régionale malgré le départ des trois pays de l’AES. Il a souligné que les Nations Unies étaient prêtes à jouer un rôle de facilitateur dans ce dialogue afin d’« harmoniser les efforts, prévenir la fragmentation et sauvegarder les acquis de l’intégration régionale ».
M. Simão a également insisté sur les défis sécuritaires grandissants dans la région, notamment avec la montée des groupes armés et le redéploiement stratégique des alliances militaires. Le représentant de l’ONU a ainsi rappelé la récente annonce de la formation d’une force commune de 5 000 soldats au sein de l’AES, destinée à contrer l’insécurité croissante.
Par ailleurs, il a annoncé son intention de se rendre prochainement dans les pays de l’AES, notamment au Mali, au Niger et au Burkina Faso, afin de poursuivre ses efforts de médiation.
Une initiative perçue comme partiale
Si les Nations Unies affirment leur neutralité dans ce processus, leur engagement a été accueilli avec scepticisme, voire avec hostilité, par de nombreux Africains. Sur les réseaux sociaux, les critiques ont fusé, mettant en doute l’impartialité de l’ONU. Certains internautes ont rappelé l’inaction de l’organisation lorsque la CEDEAO imposait des sanctions économiques sévères contre le Mali, le Burkina Faso et le Niger.
« Depuis quand les Nations Unies sont impartiale ? Où était l’ONU quand la CEDEAO affamait nos populations avec ses sanctions ? », s’interrogent de nombreux commentateurs. D’autres dénoncent une tentative d’ingérence visant à maintenir ces pays sous une influence étrangère et contestent la légitimité de l’ONU à se poser en médiateur alors qu’elle n’a pas empêché les pressions subies par l’AES.
Un rejet croissant de l’ingérence internationale
Le retrait de l’AES de la CEDEAO marque une volonté affirmée des États sahéliens de redéfinir leurs relations internationales et de renforcer leur souveraineté. Dans ce contexte, l’intervention des Nations Unies est perçue comme une tentative de maintenir un certain statu quo qui ne correspond plus aux aspirations de ces pays.
Alors que l’ONU souhaite jouer un rôle de médiateur, les peuples du Sahel semblent, quant à eux, déterminés à tourner la page des anciennes influences et à tracer une nouvelle voie, loin des institutions qu’ils jugent trop liées aux intérêts occidentaux. L’initiative onusienne, au lieu d’apaiser les tensions, risque ainsi d’accentuer le fossé entre l’AES et les organisations internationales.
Correspondance particulière
Par Modibo Doukoure